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la lutte des classes en france

En face de la bourgeoisie coalisée s’était constituée une coalition entre petits bourgeois et ouvriers. C’était ce qu’on appelait le parti social-démocratique. Les petits bourgeois s’étaient vus mal récompensés après les journées de Juin 1848. Leurs intérêts matériels se trouvaient menacés. Les garanties démocratiques qui devaient assurer la satisfaction de ces intérêts étaient mises en question par la contre-révolution. Ils se rapprochèrent donc des ouvriers. D’autre part, leur représentation parlementaire, la Montagne, tenue à l’écart lors de la dictature des républicains bourgeois, avait, pendant la seconde moitié de l’existence de la Constituante, reconquis, en luttant contre Bonaparte et les ministres royalistes, sa popularité perdue. Elle avait conclu une alliance avec les chefs socialistes. En février 1849, on célébra l’alliance par des banquets. On esquissa un programme commun, on fonda des comités électoraux communs, on présenta des candidats communs. On émoussa les revendications sociales du prolétariat de leur pointe révolutionnaire ; on leur donna une tournure démocratique ; on dépouilla de leur forme purement politique les prétentions démocratiques de la petite bourgeoisie et on fit ressortir leur pointe socialiste. Ainsi naquit la Social-Démocratie. Le résultat de cette combinaison, la nouvelle Montagne, renfermait, sauf quelques figurants tirés de la classe ouvrière et quelques sectaires socialistes, les mêmes éléments