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la lutte des classes en france

Les royalistes coalisés intriguaient entre eux dans la presse, à Ems, à Claremont, en dehors du Parlement. Dans les coulisses, ils reprenaient leurs anciennes livrées orléanistes et légitimistes et recommençaient leurs anciens tournois. Mais, sur la scène publique, dans leurs actes principaux, officiels, comme grand parti parlementaire, leurs devoirs envers leurs dynasties respectives se bornaient à de simples révérences et ils ajournaient in infinitum la restauration de la monarchie. C’est en qualité de parti de l’ordre qu’ils accomplissaient leur œuvre réelle, à titre social, non à titre politique, comme représentants du monde bourgeois, non comme chevaliers de princesses errantes, comme classe bourgeoise en opposition avec les autres classes et non comme royalistes en opposition avec les républicains. Et à ce titre, comme « parti de l’ordre », ils ont exercé sur les autres classes de la société un pouvoir beaucoup moins limité, beaucoup plus rigoureux qu’à un moment quelconque de la Restauration ou de la monarchie de Juillet. Une telle domination n’était d’ailleurs possible que sous la forme de la République parlementaire. Sous cette seule forme, en effet, les deux grandes divisions de la bourgeoisie française pouvaient s’unir et mettre à l’ordre du jour la suprématie de leur classe au lieu du règne d’une fraction de cette classe. Si comme « parti de l’ordre » ils insultaient néanmoins la République et exprimaient leur aversion à son égard,