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remercier Sa Majesté d’avoir rempli tous les désirs de son peuple. Mais dans la nuit il y eut attaque de la foule par la troupe, on vit les barricades, la résistance et la défaite de la royauté. Dès lors tout se trouva changé : les mêmes classes ouvrières que la bourgeoisie avait tendance à laisser à l’arrière-plan étaient mises en avant ; elles ont combattu et fait des conquêtes et sont devenues tout d’un coup conscientes de leur force. Les restrictions portant sur le suffrage, la liberté de la presse, l’admission au jury, le droit de réunion, restrictions qui auraient été très agréables à la bourgeoisie, car elles ne touchaient que les classes qui se trouvent au-dessous d’elles, n’étaient plus possibles maintenant. Le danger de voir se répéter les scènes d’ « anarchie » comme à Paris était imminent, et devant lui disparaissaient toutes les divergences. Les amis et les ennemis de plusieurs années s’unirent contre l’ouvrier victorieux, quoiqu’il n’eut encore formulé aucune revendication spéciale ; une alliance entre la bourgeoisie et les soutiens du système qu’on venait de renverser fut conclu sur les barricades mêmes de Berlin. On devait faire les concessions nécessaires, mais n’accorder que l’inévitable ; un ministère formé des chefs de l’opposition de la Diète Réunie devait être constitué, et, en retour des services rendus par lui en sauvant la couronne, il devait avoir l’appui de tous les piliers de l’ancien Gouvernement : l’aristocratie féodale, la bureaucratie,