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On peut dire que la révolution de Vienne a été faite presque par l’unanimité de la population. La bourgeoisie (à l’exception des banquiers et des agioteurs), les petits industriels, les ouvriers, — tout le monde s’est soulevé en même temps contre un Gouvernement détesté de tous : il était d’ailleurs si universellement haï que la petite minorité de nobles et de financiers qui le soutenaient sont devenus invisibles dès la première attaque. Les classes moyennes avaient été tenues par Metternich dans une ignorance politique telle que les nouvelles de Paris, sur le règne de l’anarchie, du socialisme et de la terreur et sur les luttes imminentes entre la classe des capitalistes et celle des travailleurs t’étaient pour elles complètement incompréhensibles. Dans leur innocence politique, ces hommes ne pouvaient attribuer à ces nouvelles aucune signification, ou bien encore elles les croyaient être des inventions diaboliques de Metternich, destinées à les effrayer pour les faire rentrer dans l’obéissance. De plus ils n’avaient jamais vu les ouvriers agir en classe ou défendre leurs intérêts de classe distincts. Leur expérience passée ne leur donnait aucune idée de la possibilité de différends entre les classes qui, maintenant, s’étaient si cordialement unies pour renverser le Gouvernement haï par tout le monde. Ils voyaient les ouvriers d’accord avec eux sur tous les points : une constitution, le jury, la liberté de la presse, etc. Ainsi, en mars 1848 du