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allemande et des miettes mal comprises de socialisme français, en particulier de saint-simonisme ; et la clique des écrivains qui discouraient sur cet ensemble hétérogène d’idées s’intitulait présomptueusement « la Jeune Allemagne » ou « l’École moderne ». Depuis, ils se sont repentis des péchés de leur jeunesse, mais n’ont pas amélioré le style de leurs écrits.

Enfin, la philosophie allemande, qui constitue le thermomètre le plus compliqué, mais en même temps le plus sûr, du développement de l’esprit allemand, s’est prononcée en faveur de la classe moyenne avec Hegel, qui, dans sa « philosophie du droit », proclamait la monarchie constitutionnelle la forme finale et la plus parfaite du Gouvernement. En d’autres termes, il annonçait ainsi l’avènement prochain au pouvoir politique des classes moyennes du pays. Après sa mort, ses élèves ne s’arrêtèrent pas là. La fraction la plus avancée de ses disciples, qui soumettait d’une part toute croyance religieuse à l’épreuve d’une rigoureuse critique et secouait jusque dans ses fondations le vieil édifice du christianisme, émettait en même temps les principes politiques les plus hardis qu’il ait jamais été donné d’entendre à une oreille allemande et essayait de remettre en honneur la mémoire des héros de la première Révolution française. Si le langage philosophique abstrus, dont s’enveloppaient ces idées, obscurcissait l’esprit de l’écrivain et du lecteur, il aveuglait en même temps les yeux du