Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’intérieur de la Ligue, rien de ce qui lui survenait d’important ne nous restait inconnu. D’autre part, nous agissions par la parole, par la lettre, et par la presse sur les conceptions théoriques des membres les plus importants de l’Association. Nous nous servions aussi de différentes circulaires lithographiées que nous envoyions par le monde à nos amis et à nos correspondants dans certaines occasions : il s’agissait des affaires intérieures du parti communiste qui se constituait. La Ligue elle-même entrait parfois en jeu. Ainsi un jeune étudiant westphalien, Hermann Kriege, qui partait pour l’Amérique et s’était présente comme émissaire de la Ligue, s’associa avec ce fou de Harro Harring, pour, grâce à la Ligue, faire sortir de ses gonds l’Amérique du Sud ; il avait fondé un journal où il prêchait, au nom de la Ligue, un communisme d’amour fondé sur l’amour, débordant d’amour. Nous lançâmes une circulaire dirigée contre lui : elle ne manqua pas son effet. Kriege disparut de la scène.

Plus tard Weitling revint à Bruxelles. Mais ce n’était plus le jeune et naïf compagnon tailleur qui, stupéfait lui-même de son propre talent, cherchait à s’éclairer sur ce que pourrait bien être une société communiste. C’était le grand homme que les envieux poursuivent parce qu’il les gêne, qui ne voit partout que rivaux, ennemis intimes, embûches. C’était le prophète élu de pays en pays, qui portait en poche une recette toute prête permettant de réaliser le ciel sur la