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Notre procès a quelque ressemblance avec celui qui fut instruit à Strasbourg, en 1836. À ce moment aussi le Gouvernement français laissa en liberté, pour des motifs politiques, le principal accusé, le président actuel de la République française, alors qu’il traduisait devant les assises les officiers et les citoyens qui avaient favorisé les vues du prétendant. Les jurés de Strasbourg acquittèrent ces derniers à l’unanimité, bien qu’ils eussent été pris les armes à la main.

Messieurs les jurés, je n’ai plus rien à ajouter à ma défense. Je suis persuadé, en effet, que vous reconnaissiez ou non à l’Assemblée nationale le droit de refuser les impôts, vous répondrez par un acquittement à la plainte du parquet.


L’inculpé Schneider II a la parole :


Karl Schneider II : Messieurs les jurés. Quand la nouvelle du triomphe de la contre-révolution à Vienne arriva à Berlin, la contre-révolution qu’on préparait depuis longtemps en notre pays suivit de près. Ici comme là-bas, les instruments des anciens pouvoirs, qui venaient de renaître à l’instant s’empressèrent de poursuivre, sous le couvert des lois, tous ceux qui, en quelque façon, avaient participé à la précédente révolution. À Vienne, ces lois furent appliquées par Windischgrätz et par les Croates. La Prusse avait Wrangel, les avocats et les procureurs généraux. Ici comme là-bas, les jugements et les réquisitoires ne se mesurèrent pas à l’aune des lois. Quiconque est suspect, quiconque est soupçonné d’un acte qui tomberait sous le coup de lois inapplicables si l’on s’en tenait à la lettre est menacé de la potence. On lui distribue la poudre et le plomb. L’inculpé sur lequel ne pèse même pas un soupçon est gratifié d’un certain nombre d’années de travaux forcés, qui varie suivant les circonstances. Comme on avait honte de nous accuser