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fautes, ou les erreurs, ni dans les trahisons de quelques chefs, mais dans l’état social général, dans les conditions d’existence de chacune des nations ayant pris part au mouvement. C’est un fait universellement reconnu : les mouvements soudains de février et de mars 1848 n’étaient pas l’œuvre d’individus isolés, mais des manifestations spontanées et irrésistibles des besoins des nations, besoins conçus plus ou moins distinctement, mais toujours ressentis clairement par de nombreuses classes d’habitants dans chaque pays ; si, cependant, vous étudiez les causes de succès de la contre-révolution vous rencontrerez partout cette réponse commode : C’est monsieur un tel, ou le citoyen un tel qui ont « trahi » le peuple. Cette réponse peut être vraie ou non, suivant les circonstances ; mais, dans aucun cas, elle ne sert à expliquer quoi que ce soit, ni ne montre comment il est arrivé que le « peuple » se soit ainsi laissé trahir. La pitoyable destinée pour un parti politique qui voit tout son bagage se réduire à ceci : il sait que le citoyen un tel ne mérite aucune confiance !

L’étude et l’exposé des causes du bouleversement révolutionnaire et de sa disparition présentent, de plus, au point de vue historique, une importance supérieure. Quel intérêt peuvent offrir, quelle lumière peuvent apporter à un Anglais ou à un Américain qui a observé ces divers mouvements à une distance trop grande pour pouvoir distinguer le détail des opérations.