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tions de Saxe et de la Prusse Rhénane se sacrifièrent pour gagner du temps et permettre d’organiser le mouvement dans l’Allemagne du Sud. Jamais la situation n’avait été aussi favorable pour une insurrection provinciale et partielle. À Paris, on s’attendait à une révolution ; les Hongrois étaient aux portes de Vienne ; dans tous les États de l’Allemagne centrale, non seulement la population, mais même les troupes, étaient très favorables à l’insurrection et n’attendaient qu’une occasion pour se joindre ouvertement à elle. Et, malgré cela, une fois remis entre les mains de la petite bourgeoisie, le mouvement fut perdu dès le commencement. Les gouvernants petits bourgeois, surtout ceux de Bade — M. Brentano en tête — n’oubliaient jamais qu’en usurpant la place et les prérogatives du souverain « légitime », le grand-duc, ils commettaient le crime de haute trahison. Ils s’asseyaient dans les fauteuils ministériels ayant la conscience de leur crime dans le cœur. Et que peut-on attendre de gens aussi poltrons ? Non seulement ils abandonnèrent l’insurrection à sa spontanéité incohérente et, par conséquent, inefficace, mais encore ils firent tout ce qui était en leur pouvoir pour enlever au mouvement tout ressort, l’amollir et l’anéantir. Et ils y réussirent, grâce à l’appui zélé de ces profonds politiciens qu’étaient les héros « démocrates » de la petite bourgeoisie, qui croyaient véritablement « sauver le pays », pendant qu’ils se laissaient mener par le bout du nez