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DE L’ENSEIGNEMENT DE NOTRE LANGUE

L’étude historique de la grammaire facilitera singulièrement la connaissance approfondie du verbe français.

Après l’avoir comparé au verbe latin, d’où il est presque partout tiré, elle nous fera connaître le petit nombre de points par lesquels il en diffère.

Le futur n’a aucun rapport avec le futur latin. Nul ne songerait à tirer d’amabo, j’aimerai, ou de legam, je lirai. Il a été créé avec beaucoup de régularité, mais par un procédé différent et tout particulier. Nous avons dit[1] qu’il se forme de l’infinitif français. C’est là un fait réel et non une invention grammaticale. Quand nous disons : j’ai à marcher, j’ai à lire, j’ai à recevoir, j’ai à rendre, il y a dans ces phrases une idée de futur ; elles sont la transcription dans un ordre inverse du futur français qui se compose tout simplement du présent du verbe avoir ajouté à un infinitif :

Je marcher ai, je lir(e)ai, je recev(oi)rai, je rendr(e)ai.

Le conditionnel, qui n’est point tiré non plus des langues classiques, s’est formé par un procédé analogue.


La connaissance de l’origine et de l’histoire des autres parties du discours, notamment des prépositions et des adverbes, en précisera le sens, et guidera dans l’emploi qu’on en doit faire.

Sans multiplier ici outre mesure les exemples des applications de détail, contentons-nous d’indiquer la théorie de la négation, si obscure dans nos grammaires françaises, mais complètement élucidée par un excellent traité de M. Schweighæuser[2] ; mis à profit dans une large mesure par M. A. de Chevallet[3].

  1. Voyez p. 39.
  2. De la négation dans les langues romanes du midi et du nord de la France. — Paris, Didot, 1852, in-8o.
  3. Origine et formation de la langue française. — Paris, 1853–1857, 3 vol. in-8o, t. III, p. 334 et suivantes.