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Molière et les Grammairiens[1]

Tout semble dit sur les emprunts de Molière : aucune source ne paraît avoir été négligée par ses commentateurs ; ils nous ont fait connaître par le menu les comédies ou les récits romanesques qui lui ont fourni le fond ou les détails de certaines de ses pièces. Mais ce n’est pas là, à tout prendre, ce qui nous révèle le mieux les secrets de sa composition. Qu’il ait su faire un choix habile dans des ouvrages d’un genre analogue au sien, cela n’a rien de fort extraordinaire, mais que, transportant sur la scène des passages tirés d’ouvrages purement techniques, de traités grammaticaux par exemple, il ait su leur communiquer ce mouvement, cette vivacité qui contribuent si fort au succès des ouvrages comiques, n’est-ce pas l’indication la plus significative de ses procédés de travail, la marque la plus caractéristique de son génie ?

Il a le don de trouver, et toujours ses trouvailles l’emportent en gaieté sur les inventions de la fantaisie la plus folle.

Voici, par exemple, une étymologie du docteur de la Jalousie de Barbouillé (sc. vi).


— Savez-vous d’où vient le mot bonnet ?

— Nenni.

— Cela vient de bonum est, bon est, voilà qui est bon, parce qu’il garantit des catarrhes et fluxions.


Qui ne serait tenté de croire à une parodie de la

  1. 1890. Conférence faite à la Société scientifique et littéraire des Instituteurs de France.