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ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

Le reste ira, ne vous déplaise,
En vin, en joie Et cætera.
Ce mot-ci s’interprétera
Des Jeannetons, car les Clymènes
Aux vieilles gens sont inhumaines[1].

Enfin, notre auteur dit dans une de ses épîtres :

Mignon a la taille mignonne,
Toute sa petite personne
Plaît aux Iris des petits chiens,
Ainsi qu’à celles des chrétiens[2].

On voit que La Fontaine n’emploie presque jamais ces beaux noms sans une nuance d’ironie. Il était certes bien loin de partager l’indignation de son ami Boileau contre ceux qui s’avisent de

… changer sans respect de l’oreille et du son
Lycidas en Pierrot et Philis en Toinon.

Son opinion à ce sujet ne saurait être un instant douteuse. Il l’a exprimée, avec sa finesse habituelle, au commencement d’un de ses contes :

Les gens du pays des fables
Donnent ordinairement
Noms et titres agréables
Assez libéralement ;
Cela ne leur coûte guère :
Tout leur est nymphe ou bergère
Et déesse bien souvent.
...........
De ce privilège insigne
Moi, faiseur de vers indigne,
Je pourrois user aussi
Dans les contes que voici ;
Et s’il me plaisoit de dire
Au lieu d’Anne Sylvanire,
Et pour messire Thomas,
Le grand druide Adamas,
Me mettroit-on à l’amende ?
Non, mais, tout considéré.
Le présent conte demande,
Qu’on dise Anne et le curé[3].

  1. Lettre au duc de Vendôme, septembre 1689 ; tome II, p. 749.
  2. IX, 21.
  3. Liv. IV, c. IV.