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ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

de son peu de connaissance de la langue française :

… si votre majesté
Est curieuse de beauté,
Qu’elle fasse venir mon frère :
Aux plus charmants il n’en doit guère.
...............

Là-dessus son interlocuteur répond :

...............
Voyons si nos beautés en seront amoureuses,
Si ses appas le mettront en crédit[1].

La fauconnerie a fourni un grand nombre d’expressions à la langue ordinaire. Le père Bouhours et, de nos jours, M. Ampère en ont fait, d’après Henri Estienne, une énumération que certains passages de La Fontaine pourraient compléter utilement.

Notre poète dit en parlant d’un milan :

Son maître le rappelle, et crie, et se tourmente,
Lui présente le leurre, et le poing, mais en vain[2].

Leurre est ici employé au propre, et s’applique au morceau de cuir façonné en forme d’oiseau dont on se servait pour rappeler l’animal. On conçoit que nos pères aient donné à ce mot le sens de tromperie, qu’il a conservé jusqu’à nous :

L’exemple est un dangereux leurre[3].

On trouve aussi dans La Fontaine se laisser leurrer[4], pour se laisser tromper.

Enfin, le passage suivant présente une acception très naturelle du mot Leurrer, qui n’a été recueillie par aucun lexicographe :

  1. Liv. I, c. I, 15.
  2. Liv. XII, fab. xii, 54.
  3. Liv. II, fab. xvi, p. 25.
  4. Liv. III, c. III, p. 30.