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LA LANGUE DE RACINE

fondie du Lexique judiciaire, mais à des circonstances toutes fortuites. « C’est, dit-il dans l’avis Au Lecteur (tome II, p. 142), une langue qui m’est plus étrangère qu’à personne, et je n’en ai employé que quelques mots barbares que je puis avoir appris dans le cours d’un procès que ni mes juges ni moi n’avons jamais bien entendu ». On trouvera ces mots de Palais (ceux qui méritent en effet l’épithète de barbares sont assez rares) aux articles : Amené sans scandale, Appointement, Appointer, Assigner, Comparoître, Compulsoire, Contredit, Décréter, Défendeur, arrêt de Défense, Demandeur, Dépens, Dit, Informer, Instance, Instruire une affaire. Interlocutoire, Production, Provision, Récuser, Requête.

Outre les termes de droit proprement dits, Racine a fort à propos introduit dans ses Plaideurs des façons de parler en usage dans la pratique, telles que : un mien pré, un mien papier ; voyez Mien.

Il y a quelques mots de jurisprudence employés sérieusement dans les factums pour le maréchal de Luxembourg, dont la rédaction est attribuée à Racine ; et quelques termes de droit canonique, tels, par exemple, qu’Intrusion, Relief d’appel comme d’abus, dans l’Histoire abrégée de Port-Royal.

Dans cette même histoire, s’il y a quelques expressions du langage mystique, comme celle-ci : « la Mère des Anges et la Mère Angélique n’étoient point assez intérieures au gré de ces pères », elles sont rares, et Racine les employait moins pour son compte qu’il ne les rapportait historiquement.

Mais le véritable langage particulier, nous n’osons dire technique chez Racine, c’est celui de la galanterie. Quelque élégance qu’il ait su lui donner, ce n’est pas là que son art d’écrivain doit être admiré ni même approuvé. Il est à regretter qu’il ait fait d’assez fréquents emprunts à cette langue romanesque, dont il est