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LA LANGUE DE RACINE

nombre de critiques et de commentateurs, principalement vers la fin du siècle dernier.

Parmi les mots qui, dans les œuvres de Racine, ont plutôt reçu l’empreinte de l’époque que celle du poète, nous citerons, à titre d’exemples, et sans nous piquer d’être complet :

Courage, dans le sens de « cœur » ; Détestable, signifiant « digne d’être détesté », et non pas seulement « très mauvais » ; Ennui, pour « violent chagrin » ; Espérance, pour « attente », même en mauvaise part ; Galant, dans le sens d’« élégant, qui a bonne grâce » en fait de littérature et d’art, même antiques, et, par exemple, en parlant des poèmes d’Homère ; Géner (mettre à la gêne, à la gehenne) « faire souffrir extrêmement » ; Génie, signifiant « le naturel », sans exprimer l’idée de supériorité créatrice, etc. ; Honnête, honnêtement, au sens de « convenable, convenablement, facilement » : « habit honnête, je n’en vivrois que trop honnêtement » ; honnête homme, dans son sens d’autrefois assez peu précis, et beaucoup plus étendu que celui qu’a conservé de nos jours cette expression ; Imbécile, au sens latin de « faible » ; Incommodé, pour « gêné, indigent » ; Lettre, pour « écriture, main », façon d’écrire à laquelle on reconnaît qu’un écrit vient de telle ou telle personne ; Libertinage, dans le sens que nous donnons à « libre pensée » ; Manière, pour « espèce » : « cette manière de lettre ». Méchant a une force qu’il a aujourd’hui perdue, et s’emploie dans le plus haut style, en parlant d’un criminel, d’un grand coupable ; d’un autre côté, dans un langage plus familier, il a souvent la signification de mauvais : « méchants auteurs, méchantes maximes, méchante morale » ; Misère a l’acception générale de « malheur » ; Nourrir, nourriture, celles d’« élever, éducation » ; Oppressé, qui n’a plus aujourd’hui qu’un sens purement physique, se prend au figuré comme maintenant opprimé ; Parties marque les