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DE LA LANGUE DE CORNEILLE

l’histoire de la vie de Corneille et des personnes avec lesquelles il s’est trouvé en rapport. Ces recherches, qui conduiraient assez loin, seraient ici fort déplacées ; mais nous n’avons pu nous soustraire au désir de donner du moins quelques renseignements tout à fait indispensables à l’intelligence de ce curieux morceau[1].

Le Timandre dont parle Corneille n’est autre qu’un certain abbé Le Gendre, curé de léglise Saint-Michel d’Hénouville, fort grand amateur d’horticulture, et revêtu du titre officiel de contrôleur des jardins fruitiers de Sa Majesté ; en 1657, il se fit adjuger vingt-sept arpents de bois sur la lisière de la forêt de Roumare pour y faire l’essai de la culture de la vigne, et l’on trouve encore aujourd’hui, au milieu du fourré, quelques ceps qui font connaître l’emplacement de ses anciennes possessions. Quant à sa demeure, elle a bien perdu de son éclat, sans pouvoir perdre de son agrément, et le jardin, cultivé jadis avec tant de sollicitude, n’est plus qu’une de ces vastes cours champêtres, toutes plantées de pommiers, dont les branches viennent pendre jusque sur l’herbe. Ce qui n’a point changé, ou bien peu, c’est l’admirable vue dont il jouit :

La Seine, en divers lieux, bat le pied des rochers ;
L’œil, en se promenant, découvre huit clochers
Dont les noms, par hazard, terminant tous en ville,
Semblent servir de rime à celuy d’Hénouville.

M. Lefèvre, qui a recueilli avec tant de soin jusqu’aux moindres fragments de Corneille, a pourtant oublié deux opuscules, peu importants il est vrai, mais curieux pour l’histoire de la représentation des pièces de notre poète : les Desseins d’Andromède et de la Toison d’or. Ils ont échappé, du reste, aux plus exacts historiens et aux plus consciencieux éditeurs, et tout

  1. Nous les devons à l’aimable obligeance de notre confrère, M. Ch. de Beaurepaire, archiviste de la Seine-Inférieure.