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DE LA LANGUE DE CORNEILLE

aujourd’hui en usage, et l’emploi de l’é aigu dans les corps même des mots, comme dans sévérité, est une excellente innovation qu’on lui doit ; auparavant, on ne s’en servait que pour les finales ou dans le cas de la suppression d’une s.

M. Taschereau a indiqué, dans sa préface des œuvres de notre poète, quelques autres habitudes orthographiques fort constantes que Corneille n’a pas érigées en règles, mais dont il ne s’est jamais départi. Il supprime dans une foule de cas les doubles consonnes ; il écrit toujours maistre et maîtresse ; enfin, à la seconde personne de l’impératif et à la première du présent de l’indicatif, il écrit voy, pren, devant une consonne, et vois, prens, devant une voyelle. Cette dernière observation est fort importante, elle prouve combien on s’est mépris quand on a regardé la suppression de l’s en pareil cas comme une licence destinée à faciliter la rime ; c’était un usage général observé non seulement par Corneille, mais par la plupart de nos classiques.

En présence d’un système orthographique aussi suivi, aussi particulier, nous avons cru devoir écrire partout les exemples et les passages allégués comme ils l’ont été par l’auteur même, bien que dans notre opinion les bases de cette méthode appartiennent plutôt à Thomas qu’à Pierre, qui, du reste, l’a en tout cas franchement adoptée et défendue avec ardeur.

Ce qui nous semble plus particulier à notre poète, c’est le soin qu’il a pris de perfectionner la versification, soit en observant d’une manière plus constante les règles qui, jusqu’à lui, n’avaient été que facultatives, soit en revenant, pour le nombre des syllabes de certains mots, aux habitudes suivies par nos anciens auteurs.

Ménage, qui cite volontiers avec une orgueilleuse confiance son idylle de l’Oiseleur à côté du Cid et de Cinna, remarque, par exemple, dans ses Observations