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t-on que le gouvernement actuel a voulu réparer les erreurs du règne précédent, ou bien qu’il a montré en cela moins de prudence que celui-là ? Toujours est-il qu’aux yeux du gouvernement, l’usage de la langue russe, jugé inopportun en 1848, ne l’est plus en 1870. En changeant sa manière de voir, il aura sans doute tenu compte des circonstances et des situations du moment. Nous ne faisons pas autre chose, quand nous disons qu’il ne faut pas perdre de vue l’ensemble des mesures administratives prises depuis 1863 dans le but avoué de russifier les provinces de l’ouest. Si donc nous nous inscrivons contre l’introduction du russe dans le culte catholique, ce n’est point que la chose soit mauvaise en elle-même ; c’est uniquement à cause de l’ensemble des circonstances dans lesquelles elle est offerte aux populations catholiques de la Russie occidentale. Pour bien apprécier cette nouvelle mesure, il faut l’envisager dans son origine, ses applications et ses effets ; il faut voir aussi si elle se concilie avec les intérêts de l’État, des populations et de l’Église.

Or, l’origine en est viciée, l’application violente et les conséquences ne sauraient être que désastreuses pour la religion catholique. Elle porte à la fois atteinte au droit, à la liberté et à la religion. Elle ne se concilie pas non plus avec les intérêts qui y sont mis enjeu. Viciée dans sa source et inutile à l’État, elle est odieuse aux populations et fatale aux âmes et à l’Eglise. Tels sont les motifs principaux qui rendent cette mesure inacceptable à la conscience catholique et que nous essayerons de développer le plus brièvement possible.

D’abord, cette mesure est viciée dans son origine et inefficace pour le but qu’on veut atteindre. Son vice originel est d’avoir été portée par une autorité tout à fait incompétente, en dehors du concours de l’Eglise, qui seule avait le droit d’en prendre l’initiative. De tout ce qui précède, il résulte clairement que non seulement le pouvoir séculier est le seul auteur de la mesure en question, mais qu’il a encore fait cruellement expier aux premiers pasteurs la fermeté dont ils avaient fait preuve en refusant d’approuver ce qui condamnait leur conscience. Cette anomalie s’explique facilement quand on se rappelle la fausse notion qu’on se fait en Russie de l’Eglise et la suprématie usurpée que l’État y