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position, soit par leur richesse... ; mais alors même... on trouverait qu’il y a deux nationalités rivales à se disputer les provinces, la nationalité polonaise et la nationalité juive, ou l’aristocratie de race et l’aristocratie financière. Il y a onze juifs sur dix Polonais, et, dans les provinces de Vitebsk, Mohilev et Kiev, la supériorité numérique des juifs est encore plus grande. A Mohilev, il y a quatre fois plus de juifs que de Polonais. Tant qu’on maintient le principe que la nationalité d’un pays est à déterminer d’après celle de la majorité de ses habitants, et à moins de nier que soixante est plus que seize, — seize plus que onze, — et onze plus que dix, — les provinces jadis soumises à la couronne de Pologne doivent être déclarées russes, lithuaniennes ou juives, mais jamais polonaises (p. 95).


C’est cependant cette dernière dénomination qui est la plus reçue en Occident et elle ne manque pas d’avoir sa raison d’être. D’abord, parmi les Polonais eux-mêmes, il en est fort peu qui soutiennent que les Russiens soient d’origine polonaise. S’ils donnent aux provinces occidentales le nom de polonaises, c’est parce qu’ils se mettent au point de vue politique, que leur domination passée durant des siècles justifie assez. Schédo-Ferroti n’en tient pas suffisamment compte. Au lieu de parler de la nationalité juive ou lithuanienne, il aurait mieux fait d’évaluer l’élément grand-russe qui est principalement en cause et de nous expliquer quelle nécessité il y a de russifier le pays, s’il est vrai que cet élément y est dominant et d’une supériorité numérique écrasante.

L’assertion des Polonais, dit-il, que leurs anciennes conquêtes, la Podolie, la Volhynie etc., leur reviennent de droit, est aussi vraie que si l’on disait que la Guyenne, l’Aquitaine, la Normandie, la Picardie et même l’Ile-de-France avec Paris, sont des provinces anglaises, parce que dans le temps elles ont un moment appartenu aux Anglais. En élevant des prétentions sur ces anciennes conquêtes, les Polonais compromettent leur propre cause, car en évoquant le droit de conquête, ils confirment la domination russe sur leur pays, qui est une conquête de la Russie (p. 89).

On pourrait simplement nier la parité. Il y a, en effet, une énorme différence entre la domination d’un moment et celle qui a duré quatre siècles. Ensuite, ou pourrait faire observer que ce droit historique s’appuie sur la conquête autant que sur les traités : les deux Russies (Blanche et Petite) appartenaient