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LE MUSICIEN DE PROVINCE

fourbu et ne recommença jamais une excursion de ce genre.

M. Grillé, à onze heures, avait terminé sa promenade ; il se préparait alors au grand déjeuner et ne se présentait à table qu’après avoir endossé sa redingote.

Dans l’après-midi, après une sieste plus ou moins prolongée, il se mettait au travail, composait des méthodes et des exercices, copiait de la musique, arrangeait des morceaux. Mme Muret l’attendait vers quatre heures et c’était le moment où elle lui demandait de lui jouer quelque chose ou d’accompagner une mélodie. On faisait ainsi de la musique jusqu’à l’heure du dîner, lequel était le plus souvent très court.

Jusqu’à neuf heures du soir, on passait au jardin. Le domestique apportait deux photophores qu’il posait sur une petite table de pierre, en un coin de la terrasse. M. Grillé s’asseyait dans un fauteuil d’osier. Mme Muret l’écoutait causer poésie ou théâtre ; le visage sérieux de la négresse augmentait de compassion lorsque M. Grillé disait ses mécomptes, les jalousies dont il avait été l’objet et la nullité artistique de ses confrères.

Des moustiques tourbillonnaient autour des lumières, l’air était doux. L’instant terminait le mieux du monde une journée d’été dont tous les instants avaient été agréables.