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LE MUSICIEN DE PROVINCE

Des instruments de musique occupèrent le strapontin ; les plaids se multiplièrent ; il y en avait un pour monsieur, un pour madame, un pour le cheval, un pour la boîte à violon. Le bariolage semblait voulu, charlatanesque.

Cette aventure, la plus cocasse des cocasseries de M. Grillé, accentua la décadence que la maladie avait déterminée.

Les confrères que M. Grillé méprisait trop souvent, le détestaient. Ils trouvèrent matière à moquerie, eurent pour eux les rieurs et démolirent facilement la réputation du professeur. Les leçons se firent rares. L’ordonnance du capitaine, devenu vite exigeant, donnait au cheval des soins distraits.

Le père Grillé se fatiguait de conduire son étrange équipage et Mme Grillé se lassait de son rôle de groom, comme aussi des sourires que provoquait leur passage dans les rues de Turturelle.

Le cheval même, qui finissait par s’endormir en marchant, n’obéissait plus, devenait, par son inertie, dangereux.

Un camion lourd, conduit par un ivrogne, avait failli culbuter dans le déblai du boulevard Ney, le panier et ses occupants.

Quand je quittai Turturelle, pour aller habiter Paris, l’attelage était vendu.

Un dernier regard donné au salon de l’Académie, me révéla la disparition d’objets plus