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res vitrées suspendues à la muraille, au-dessus du piano et de la table. On y voyait des fleurs en papier, des couronnes dorées, des écharpes de soie rose ou blanche sur lesquelles on lisait : À Grillé ! — À notre chef Eugène Grillé — À M. Grillé, hommage d’un groupe d’admirateurs ! — Il y en avait tout un tas dans chaque armoire et il y avait trois armoires, grosses comme des cathédrales, peintes en jaune avec des frontons sculptés aux ornements allégoriques. Je n’ai jamais rien vu d’aussi peu émouvant dans la décrépitude.

Au milieu de tout cela s’étalait un portrait de M. Grillé très jeune, en tenue de chef de musique des pompiers, le sabre au côté, le bâton levé, conduisant une imaginaire fanfare dans un champ de choux.

Tous les objets qui ornaient la cheminée appartenaient plus ou moins à la musique. Cette boîte où M. Grillé mettait ses cordes affectait la forme d’un violon et le couvercle de cette autre s’ornait d’une portée couverte de croches ; un encrier figurait un tambour ; pas un porte-plume qui ne fût surmonté d’une lyre ou d’une coquille de contrebasse.

Sur la cheminée, il y avait quatre grenouilles en porcelaine. Ces hideux animaux, assis dans des poses graves imaginées par un crétin et réalisées par un bourreau, montraient avec indifférence des ventres jaunes et faisaient le geste