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présente à toutes les mémoires. On parlementa pendant six jours avec les meneurs sans pouvoir décider l’armée à marcher ; dans tout le camp ce n’étaient que murmures, signes précurseurs de désertion. Le 23 décembre, les cavaliers du soubab entourèrent tumultueusement la tente du divan et lui déclarèrent que si on ne reprenait pas le chemin d’Haïderabad, on saurait bien l’y forcer et y contraindre le soubab lui-même. Le lendemain matin, plusieurs chefs se réunirent autour d’un tombeau de leurs ancêtres sur lequel tous jurèrent de ne pas avancer avant d’avoir reçu leur solde arriérée. Enfin le 25 un chef fut assassiné et le divan aurait eu le même sort sans une protection spéciale dont il fut l’objet.

Pour conjurer cet esprit de révolte, Salabet j. n’avait que son autorité morale, et c’était peu de chose : jusque dans son camp, tout le monde reconnaissait sa faiblesse et son incapacité. Loin d’imposer sa volonté, il vint au contraire trouver Bussy et lui déclara qu’il ne voulait absolument pas franchir la Quichena. Bussy eut beau lui représenter que s’il manquait d’argent pour payer ses troupes, nulle occasion n’était plus favorable pour s’en procurer : le Maïssour lui devait des contributions arriérées et avait d’immenses ressources. Par conséquent nul parti n’était plus conforme à ses intérêts. Se plaçant plus spécialement à notre point de vue, Bussy sentit que si, Salabet j. reculait devant l’expédition du Maïssour, il ne rentrerait aucun argent et que nous risquions fort de ne pas toucher notre prêt le mois suivant. Impasse également fâcheuse pour l’un et pour l’autre. Tout ce que Bussy put dire à cet égard fut inutile : Salabet j. s’obstina dans sa résolution[1]. Bussy n’avait pas assez de monde pour impo-

  1. Dans un autre récit des mêmes événements, le P. Monjustin expose en une lettre à Dupleix, du 31 décembre, que, devant le refus