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moyens de persuasion, et c’est pourquoi Dupleix recommandait à Bussy de ne jamais froisser le soubab ou le divan dans leurs sentiments d’amour-propre national et leur laisser en temps normal toutes les apparences de l’indépendance la plus complète.

« Ce dont je vous prierai toujours, lui écrivait-il le 5 juin, ce sera de ne pas lui [le soubab] faire connaître, autant qu’il sera possible, qu’il est dans notre dépendance et que plus vous aurez de forces et plus il faudra affecter de le prévenir en tout et marquer plus d’empressement à sa conservation et à suivre ses ordres. »

Conserver à tout prix Salabet j. tel était le principe dominant de la politique de Dupleix. Cet homme était notre ouvrage : il nous était sacré. Nous lui devions nos actes d’investiture sur le Carnatic ; lui disparu, tous nos titres pouvaient cesser d’être légitimes. Nous étions liés ensemble par la communauté des intérêts. Cependant Dupleix ne constatait pas sans une certaine mélancolie que, si cette politique était intelligemment appliquée par Bussy et si ses efforts étaient compris par plusieurs de ses officiers qui lui témoignaient leur admiration en des lettres personnelles, il y avait plus d’un sceptique jusque dans son entourage et il s’en affligeait sans se décourager.

« Avec l’assistance de Dieu, écrivait-il encore à Bussy le 5 juin, tout ira au mieux pour la nation pour laquelle je sacrifie bien des années de ma vie. M’en aura-t-elle obligation ? Dieu le sait, car je vois ici des gens qui ont l’âme assez basse et qui dans le fond sont au désespoir de la prospérité de cette nation dont ils font nombre, qui se réjouissent des mauvais événements. Que leur en revient-il ? ils ne le savent. L’envie les poignarde. »

Au moment où Dupleix écrivait ces lignes, notre situa-