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paix, une pareille situation n’était pas de nature à le déterminer à continuer la guerre. Mais comme il avait conscience qu’en proposant la paix ce serait le meilleur moyen de la faire échouer, il manœuvra de façon à ne rien aventurer. Le siège de Trichinopoly lui paraissait comme à beaucoup d’autres une entreprise qui avait dès l’origine fait dévier notre politique du véritable but qu’elle eut pu poursuivre, c’est-à-dire la possession de la partie du Carnatic contiguë au Décan et avoisinant Madras et il ne cachait à personne que si la nécessité ou les exigences des Anglais l’obligeaient à continuer la guerre, il abandonnerait le siège de Trichinopoly pour porter tous ses efforts contre Arcate. Mais il n’est pas toujours aisé de se dégager d’une affaire mal engagée, et, lorsqu’à la suite de la journée du 17 août, Godeheu eut à se demander s’il devait s’obstiner plus longtemps dans une entreprise irréalisable[1], il n’osa pas cependant prendre le parti de la retraite. Tantôt il écrivait à Maissin de lever le siège et de revenir (lettres des 20 et 23 août, 13 et 27 sept.) et tantôt de rester mais se tenir sur la défensive (lettres des 27 août, 2, 10 et 20 septembre). Dupleix a fait à Godeheu un grief de ces contradictions ; celui-ci les explique ainsi p. 259 et 260 de son mémoire de 1764 :

« J’écrivais à M. de Maissin de se préparer à revenir, quand il y avait apparence que la négociation pour la trêve ne réussirait pas et qu’il fallait se disposer à la guerre ; dans ce cas, je

  1. Bussy écrivait à ce sujet à Godeheu le 24 octobre :

    « La prise de Trichinopoly qui, dans les conjectures présentes, me paraît une chimère, ne servirait qu’à assurer un point d’honneur… Le dessein où vous êtes de porter la guerre dans le nord de la province, dont on a laissé jouir nos antagonistes avec une tranquillité et un bénéfice dont nous pouvions profiter, ce dessein, dis-je, en cas qu’on ne trouve aucune voie de pacification qui nous convienne, est le seul qu’il y ait à suivre. »