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tion moderne était alors trop nouvelle pour ne pas provoquer d’abord de l’étonnement puis de la résistance ; exposée en détail elle n’avait convaincu personne, formulée en corps de doctrines, elle arriva trop tard pour modifier les résolutions prises tant par les ministres que par la Compagnie. Lorsque le mémoire qui l’exposait parvint en France, Godeheu était embarqué pour l’Inde depuis plusieurs mois, et les espoirs de Dupleix appartenaient à un cycle révolu… ou plutôt elles appartenaient à l’avenir.

Ce mémoire, qui porte la date du 16 octobre 1753, était adressé à la Compagnie. Mais résolu, cette fois, à convaincre, Dupleix désirait être lu par beaucoup de monde et pour que la publicité du mémoire fut certaine, il en avait adressé une copie à d’Auteuil et à Amat et une autre à son neveu, avec prière de lui donner le plus grand retentissement. Le mémoire était en réalité un manifeste par lequel il espérait agir sur l’opinion, sur celle de la cour tout au moins. Il convient donc de l’analyser avec quelque détail.

Il débute ainsi :

« La diversité des sentiments dans lesquels je vois que sont mes compatriotes et même les personnes chargées de la régie de la Compagnie des Indes sur ce qui se passe dans l’Inde m’oblige de mettre au jour des vérités qu’une longue expérience m’a présentées et dont je vais faire voir l’évidence. Ces vérités sont :

que toute compagnie de commerce, quelle qu’elle soit, ne peut se soutenir par le simple bénéfice de son commerce, qu’il lui faut un revenu fixe et assuré, surtout lorsqu’elle a de grands établissements à soutenir ;

que toute compagnie doit éviter autant qu’il lui est possible l’export des matières d’or et d’argent. »