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surprise est le seul motif qui les font agir et parler, il ne faut pas s’y arrêter mais aller au fait et craindre peu que la jalousie des voisins en soit excitée, — autre raison que l’on fait semblant d’adopter pour montrer au public que l’on n’a point d’autres raisons de trouver à redire à des revenus si nécessaires à une compagnie de commerce ; mais ne pourrait-on pas au contraire penser que ces zélés qui mettent cette jalousie en avant le sont plus pour ces mêmes voisins que pour leur patrie ? Que de choses à dire et à examiner sur cet article, ainsi que sur bien d’autres dont mes lettres font voir tout le faux et que tout bon patriote sentira comme vous et moi. Il est véritablement assez singulier que je sois obligé de combattre mes compatriotes pour tout le bien que je leur ai procuré et pour prouver qu’ils parlent plus en faveur de l’ennemi commun que pour la patrie[1]. Ceci fait un phénomène assez singulier et il serait fâcheux qu’il fut glissé dans nos annales… »

« Je prie M. David [gouverneur de l’Île de France] d’expédier en toute diligence une frégate en France pour faire part des événements heureux[2] qui avaient succédé aux premiers et des nouvelles acquisitions qu’ils avaient procurées à la nation. Vous voyez au moins par ce détail qu’il n’a pas tenu à moi que vous ne fussiez bien informé sur les faux bruits que nos ennemis avaient même répandus ici. Je crois que l’on ne veut pas s’apercevoir qu’il est de l’intérêt de l’ennemi à chaque arrivée de vaisseaux de faire courir des bruits qui puissent servir à soutenir leurs actions qui ne se soutiennent que par ces sortes de manèges, dont ils sont presque toujours les dupes. Il faut avouer qu’ils se remuent un peu mieux que nous sur toutes ces matières que nous donnons trop facilement dans les pièges qu’ils nous tendent. »

  1. Même idée dans une lettre au ministre d’Argenson, du 17 janvier précédent : « Je trouve beaucoup de contradicteurs chez ceux qui devraient me seconder, puisque c’est pour eux que je travaille et non pour moi. Le roi pourrait y suppléer d’un seul mot ; sa gloire y est intéressée. » (B. N. 9151, p. 56).
  2. Ces événements heureux étaient la libération du territoire de Pondichéry et les accords conclus avec les Marates et le Maïssour.