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tions que des succès et qu’avec un peu, très peu de patience nous touchions au résultat. L’extraordinaire bonheur de Bussy ajoutait encore à ces illusions.

Cet optimisme était une force ; qui se lance dans une entreprise sans croire au succès est à moitié vaincu, mais était-ce bien d’une entreprise personnelle qu’il s’agissait ? L’État et la Compagnie y étant intéressés avaient droit de savoir très exactement ce qui se passait, ne fut-ce que pour prendre des résolutions réellement adaptées aux circonstances. Or Dupleix leur exposa rarement la situation telle qu’elle était ; il avait compté que la guerre se suffirait à elle-même avec les revenus des princes de l’Inde. Lorsque, par suite de la prolongation des hostilités qui ravageaient toujours les mêmes provinces, la source des contributions fut réduite, il ne voulut jamais reconnaître qu’il avait fait de faux calculs, et, alors qu’il était dans une situation financière très délicate, il s’obstina à ne demander à la métropole que des hommes et jamais de l’argent. Il craignait, en disant toute la vérité, que la Compagnie ne lui interdit brutalement de persévérer dans ses projets d’accroissement territorial et il espérait toujours qu’un succès décisif viendrait à son heure pour justifier son audace et mettre les directeurs devant un fait accompli qu’ils accepteraient de bonne grâce, et même avec reconnaissance.

Les Anglais n’avaient pas encore ouvertement pris parti contre lui, et, avec une naïveté qui déconcerte, il s’imaginait qu’ils observeraient toujours la même attitude, et que, retenus par l’état de paix qui régnait en Europe entre les deux nations, ils assisteraient dans l’Inde en spectateurs indifférents à nos conquêtes ou acquisitions. Une fois qu’ils furent entrés dans la guerre, il crut qu’ils seraient désavoués par leur souverain et, ce qui est plus