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le manque d’argent obligerait quand même l’armée du Décan à descendre à la côte pour aller en chercher. Citons textuellement :

« Depuis quatre ans que je suis le maître de mes opérations, j’ai toujours pris le parti le plus convenable. Si aujourd’hui elles dépendent de vos ordres, que je me ferai toujours un devoir de suivre exactement, mais que l’éloignement empêche de juger avec connaissance de cause, je vous assure, Monsieur, que nous ferons de mauvaise besogne…

« Chanavas kh. m’a prévenu qu’il ne voulait plus se mêler des affaires du Carnatic ; je vous en dis autant pour moi. Ainsi, Monsieur, vous ferez ce qu’il vous plaira. Je dirai seulement en passant que le dessein que vous avez de remettre Trichinopoly aux Maïssouriens, achèvera de nous rendre odieux et le nabab n’en tirera jamais le profit que vous vous imaginez…

« Je finis en vous assurant que quand mon projet devrait avoir les plus fâcheuses suites — ce qui n’arrivera pas — je me trouve forcé à le suivre ; ainsi, laissant à côté tout autre motif, la disette où je me trouve est le seul que je considère… Tout cela mûrement pesé, vous ne pouvez pas trouver mauvais que je refuse de m’engager dans un semblable labyrinthe pour la prochaine campagne et parce que mon zèle est toujours le même, je prends les moyens sûrs et efficaces pour mettre toutes choses dans l’ordre et les conduire à leur perfection, ce que je pourrais me flatter d’avoir fait. » (B. N. 9158. — Lettre à Dupleix des 11-22 avril).

Le ton si libre et si dégagé de cette lettre se fit presque menaçant quelques jours après. Le temps passait, l’argent ne rentrait pas et l’impatience de Bussy grandissait. Le 5 mai, il se déclara résolu de prendre possession de nos nouvelles provinces, malgré les oppositions que Dupleix pourrait y faire, dut-il en résulter les plus grands malheurs.