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À lire ce rapport dans le texte lui-même, on est moins étonné de l’audace des conceptions de Bussy que de la confiance avec laquelle il les expose. Rien ne lui paraît impossible, et cependant avec la division de nos forces, notre situation était plutôt mauvaise. Nous n’avons encore conclu aucune alliance avec les Marates et tant à Aurengabad qu’à Haïderabad et dans le reste du Décan, toutes les autorités constituées, à l’exception du soubab, nous sont nettement hostiles. Nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes et nos troupes ne sont pas payées. La tranquille assurance de Bussy paraissait un défi au bon sens et cependant les événements devaient lui donner raison, au delà même de ses espérances. Ce pays, dont il demandait l’abandon six mois auparavant, il le garda encore à la France pendant cinq ans. Le froid entêtement de Dupleix avait eu raison des arguments en apparence les plus solides pour l’évacuation. Après tout, Bussy n’était pas l’arbitre de la politique générale de l’Inde et puisque malgré ses observations on lui donnait l’ordre de la continuer, il n’avait qu’à se soumettre : c’était son devoir de soldat. Il est vrai d’ajouter que du jour où il accepta ce nouveau rôle, il le joua avec toute la conscience et toute la foi de l’homme le plus convaincu. N’est-ce pas une satisfaction inestimable de triompher de difficultés qui paraissent insurmontables ?

Dupleix lut son mémoire avec le plus grand intérêt ; jamais document n’avait mieux répondu à ses pensées et, comme nul ne servait mieux ses projets, il l’envoya au ministre en en laissant tout l’honneur à Bussy :

« Vous découvrez tous les jours, écrivit-il à celui-ci le 1er août, des talents à qui vous n’aviez pas donné l’essor. J’en suis d’autant plus charmé qu’ils prouvent la justesse de mon discernement à votre sujet. Aussi tout ce que vous faites de