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prétextes pour ne pas se rendre à Delhi aux convocations de l’empereur. Récemment encore Balagirao s’est emparé des provinces de Candèche et de Guzerate ; s’il veut aller plus loin, le Mogol ne pourra lui résister : lui aussi n’a pas d’argent. Sans nous et notre présence, le Décan serait depuis longtemps conquis. L’alliance des Marates serait par conséquent préférable à celle des Maures. Bussy ne propose pas cependant de rompre avec ces derniers, ce serait détruire notre propre ouvrage. Ce qu’il se propose de faire voir, c’est que, quand même on arriverait à une rupture avec les Maures, nos affaires n’en seraient pas désespérées. Il suffira même que les Maures voient ou même soupçonnent qu’il y a entre les Français et les Marates une entente étroite pour leur inspirer la terreur et les disposer à accepter toutes nos conditions.

Il y a plus encore : pour exécuter nos projets sur Surate, l’alliance avec Balagirao est absolument indispensable. Celui-ci possède déjà effectivement tous les environs de cette ville ; il nous suffit pour notre compte d’avoir la citadelle et le port et d’avoir les droits de souveraineté joints à quelques domaines voisins. Qu’on ne dise pas que cette alliance avec un peuple de brigands n’est pas honorable : Marates et Maures sont également des voleurs ; entre eux la différence n’est pas grande. Les Maures, avec qui nous marchons, ne sont-ils pas eux-mêmes des usurpateurs ?

Telles sont les réflexions que suggéraient à Bussy sa longue expérience, la connaissance des intérêts politiques et la forme des gouvernements du pays. Et, pour conclure, il en revenait à demander à Dupleix soit une avance de quatre à cinq laks de roupies, soit les revenus de la province de Condavir, tandis qu’il négocierait en vue de trouver dans le Décan lui-même les sommes nécessaires pour entretenir nos troupes d’une façon régulière et continue.