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Eux aussi avaient des soldats inoccupés et, non moins que Dupleix, ils devaient avoir le désir d’accroître leurs possessions dans l’intérêt de leur commerce, surtout s’ils voyaient leurs rivaux prêcher d’exemple. Il suffisait même que cet exemple leur fût donné pour qu’aussitôt l’idée de nous contrecarrer leur vînt à l’esprit. Un précurseur trouve presque toujours des imitateurs, qui souvent réussissent mieux que lui. Et tel fut, hélas ! notre destin et celui de l’Angleterre.

Mais Dupleix fut-il bien le premier gouverneur européen qui intervint dans les querelles des princes de l’Inde, avec l’espoir d’en recueillir des avantages pour la Compagnie qu’il dirigeait ? Sans remonter aux entreprises hasardées et d’ailleurs avortées de sir John Child, de 1686 à 1690, pour se libérer du joug des nababs et des rajahs, le gouverneur Dumas n’avait-il pas ouvert des voies nouvelles à l’activité des Européens lorsqu’en 1738 il se fit céder par le roi de Tanjore Sahaji le territoire de Karikal en retour de l’appui financier qu’il lui donna contre un compétiteur ? Dumas n’était pas allé, il est vrai, jusqu’à promettre des troupes, mais la guerre n’en était pas moins sortie de cet accord et Dupleix avait dû la soutenir avec des fortunes diverses jusqu’en 1748, où la paix fut rétablie avec le roi Prapat sing, successeur de Sahaji.

L’influence prise par la France sur ce point de la côte n’était pas sans inspirer quelque humeur aux Anglais, qui étaient à Goudelour depuis 1690, mais n’avaient pas d’autre établissement dans le sud jusqu’au Cap Comorin. Or, au moment où Dupleix était sollicité par Chanda S., de l’établir dans la nababie du Carnatic, l’ancien roi de Tanjore Sahaji, détrôné par Prapat sing, demandait aux Anglais de le rétablir en ses États et proposait, en échange de leurs services, de leur céder Devicotta, à l’embouchure