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conscient de ses hautes responsabilités envers le roi et la nation, l’autre inaugurant, par son prestige personnel, sa finesse, sa connaissance de l’indigène, une méthode de pénétration coloniale qui a fait fortune.

Les deux chapitres que nous venons d’exposer ne laissent pas une grande impression de réconfort. Ni au point de vue financier ni au point de vue militaire, Dupleix n’eut en main tous les instruments nécessaires au succès. Il avait compté que la guerre couvrirait toutes ses dépenses ; or, dès leurs premières victoires, ses alliés ne furent pas en état de lui rembourser toutes ses avances. Il dut continuer à leur faire crédit et finalement prendre l’administration d’une partie de leurs territoires pour se procurer des revenus. Ceux-ci lui manquèrent à leur tour, le jour où il cessa d’être complètement victorieux ; quelques-uns de ces territoires passèrent alors sous le contrôle des Anglais et les recettes diminuèrent du même coup. Puis, la guerre s’abattant aussi bien sur les vainqueurs que sur les vaincus, finit par ne plus laisser que des ruines et toutes les recettes escomptées s’en allèrent en fumée. Pour continuer la guerre, Dupleix dut recourir à des emprunts onéreux ou engager ses fonds personnels ; grâce à ces moyens de fortune, il put assurer tant bien que mal la paye de ses soldats, mais ce fût presque toujours avec du retard et, pendant ce temps, les troupes, les cipayes surtout, se refusaient à peu près à obéir et menaçaient de se débander. On ne saurait trop admirer la présence d’esprit dont Dupleix fit preuve au milieu de ces embarras sans cesse renaissants ; jamais il ne désespéra du lendemain et, lorsque Godeheu arriva