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Quoi qu’il en soit, bien ou mal instruits, comme Dupleix était toujours à court de monde pour ses vastes opérations, il les envoyait presque tout de suite à l’armée, où ils étaient loin de déployer les mêmes qualités que la race française sur les champs de bataille d’Europe. Leur valeur se ressentait presque toujours de leur origine. Ils combattaient mal et sans entrain, et comme leurs chefs manquaient aussi d’enthousiasme ou de résolution, on s’explique facilement plusieurs insuccès et l’échec final de la campagne du Carnatic.

Dupleix, qui surveillait avec une attention intéressée les moindres mouvements de ses troupes, ne négligeait aucun avis, aucun conseil et au besoin aucun ordre pour relever leur moral, entretenir leur confiance et leur donner à elles-mêmes le sens d’un honneur qui leur manquait. Il ne craignait pas alors d’entrer dans des détails qui nous paraissent aujourd’hui superflus ou exagérés : « Le premier mouvement [c.-à-d. les premières marches] fatigue le nouveau soldat, écrivait-il à Maissin, le 18 mai 1753 ; quelques petits détachements, ne serait-ce que pour les promener, les rétabliront bientôt. Vos marches ne sont point pressées et prenant les heures convenables pour les faire, vous verrez qu’à la troisième ou quatrième marche, tout ira comme vous le souhaitez. » Et à Brenier, le 30 mars de la même année : « Le soldat s’habituera à marcher, surtout lorsque vos marches commenceront de bon matin ; les premiers jours sont toujours difficiles. » (B. N. 9156, p. 170 et 126.)

Les soldats étaient nourris au compte de l’armée ; mais ils s’habillaient à leurs frais au prix coûtant par des retenues faites sur leur solde. Dupleix désirait vivement que leur tenue fût convenable ; il estimait qu’un soldat habillé imposait toujours davantage, avait meilleure façon