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des chances semblables, si l’on tient compte uniquement du nombre et des effectifs.

Ainsi s’équilibraient très sensiblement les moyens militaires des deux nations en présence. Le succès de l’une comme le revers de l’autre devait être déterminé par d’autres motifs.

Nous allons voir s’il tint à la valeur des officiers et des troupes.


Les officiers. — À tout seigneur, tout honneur. Commençons par les officiers qui commandèrent à nos deux armées : celle du Nord ou du Décan et celle du Sud ou du Carnatic.

L’armée du Nord ne connut jamais qu’un seul chef nominal, Bussy, et un intérimaire, Goupil, au cours de l’année 1753.

Ce n’est pas ici le lieu de retracer en détail la physionomie de Bussy ; sa grande figure domine tout cet ouvrage. Disons seulement que son action fut plus politique que militaire et que s’il n’eut guère à combattre, c’est qu’il aimait mieux régler les difficultés par la diplomatie que par la force, et qu’il était merveilleusement doué pour jouer ce rôle. Il connaissait à fond l’âme indigène et savait en faire jouer les ressorts les plus délicats. Ne se qualifie-t-il pas lui-même quelque part d’homme d’État ? Et vraiment il en était un par sa distinction naturelle, l’heureux scepticisme de ses pensées, la finesse de son caractère, la souplesse de son esprit, son aptitude à tout comprendre et ses dispositions à tout résoudre. Grand seigneur, il savait l’être avec le Nizam ; petit officier de fortune, il savait le rester avec ses camarades. À vrai dire, il n’est pas de plus grande figure dans toute notre histoire coloniale. C’est lui qui a donné à Dupleix tout