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tions où ils se trouvaient, ils étaient libres de n’en pas tenir compte et d’agir sous leur responsabilité[1].

Mais quelles instructions ! Rien n’y est omis, ni la paie ou la nourriture des soldats, ni les marches de l’armée, ni les mouvements à effectuer, ni la politique à suivre avec les chefs indigènes. Aux commandants de l’armée du Carnatic, Dupleix ne cesse de dire comment ils doivent s’y prendre pour passer le Coléron, qui est le grand objectif de toutes les campagnes, harceler l’ennemi, investir Trichinopoly, entretenir des espions. Il entre dans moins de détails avec Bussy, qui est beaucoup trop loin pour pouvoir les recevoir en temps utile et, d’ailleurs, n’a-t-il pas une pleine confiance en ce chef, dont les succès sont ininterrompus ? Il ne cesse de l’appeler « mon cher ami » et lui voue à chaque instant sa reconnaissance pour les résultats obtenus. Sa correspondance avec les officiers du Carnatic témoigne au contraire d’une certaine méfiance dans leur capacité ou leur zèle. Dupleix a beau leur répéter à chaque instant qu’il sait apprécier leur mérite et qu’il compte sur leur habileté et sur leur constance pour réussir ; on sent à travers les lignes que ce sont des paroles d’encouragement plutôt que de con-

  1. « Dans tous les cas pressés, vous êtes le maître d’agir comme il vous paraît le plus convenable. Vous avez à ce sujet toute ma confiance ; mais dans tous ceux qui peuvent attendre une réponse, vous devez les suspendre. Ce que je vous marque à ce sujet est dans l’ordre et vous ne devez point confondre les occurrences les unes avec les autres. » (D. à Mainville, 10 avril 1754. B. N. 9157, p. 433).

    « Que puis-je vous dire sur les mouvements que vous proposez ? A-t-on jamais fait ce que j’ai présenté ? Il semble qu’il n’y ait autre chose à faire que de rester dans un camp et d’y voir faire à l’ennemi tout ce qu’il veut ? Notre corps est assez considérable pour le mettre en mouvement et j’approuverai toujours tout ce qui conduira à gêner l’ennemi et à le détruire. Il y aurait bien des choses à faire pour y parvenir, mais on ne fait rien et l’ennemi fait ce qu’il veut. Il faut avoir bonne patience. » (D. à Very, 20 sept. 1753, B. N. 1157, p. 306).