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d’amour-propre, puisqu’il consentait à discuter ses titres et même à les reconnaître, si le soubab du Décan les reconnaissait également ; mais en réalité il était aussi intransigeant que Saunders lui-même, car il savait fort bien que Salabet j. n’aurait d’autre volonté que la sienne. Se référer au jugement du soubab était un simple trompe-l’œil et Dupleix n’était rien moins que décidé de conseiller à Salabet j. de faire des concessions. Il considérait que si les conférences de Sadras aboutissaient, ce serait peut-être la paix rétablie dans le Carnatic, mais du même coup les Anglais se trouveraient libres de manœuvrer contre Bussy. La lutte serait simplement transportée sur un autre terrain ; or à tort ou à raison, Dupleix estimait que le maintien de notre prestige dans le Décan nous était encore plus utile qu’un succès diplomatique ou militaire dans le Carnatic. N’était-ce pas du Décan que nous tirions tous nos titres et la source même de notre puissance ?

Ainsi de part et d’autre on ne se souciait guère d’arriver à un accord ou du moins nul n’en prenait les moyens. C’est ce que Dupleix exprimait à Bussy dans une lettre du 31 décembre :

« Je crois, si vous voulez que je vous dise vrai, que les conférences avec les Anglais n’aboutirent à rien, à moins que je ne prenne le parti de nous déshonorer. J’ai proposé à ce gouverneur de laisser la décision de toutes les affaires d’ici à Salabet j. qui dans le vrai est le parti le plus juste et le plus convenable. C’est sur quoi j’attends sa réponse, mais je sais qu’il n’y acquiescera pas. Cependant vis-à-vis de sa cour il se met dans son tort s’il n’accepte pas cette proposition. Je vous écrirai aussitôt que je saurai de quoi il sera question ; mais ne pensez pas que les Anglais soient gens sur la probité desquels on puisse compter.