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les cipayes fussent régulièrement payés ; or l’arombatté faisait mal son service ; s’il payait dix cipayes, vingt ne l’étaient pas. Les troupes de Vellore, de leur côté, ayant perdu leur chef, prirent la fuite. Patrice, désespérant à son tour de rien obtenir d’hommes aussi mal en train, leva le siège le 26 et, le 29, il était de retour à Gingy.


L’affaire de Tirnamallé était terminée : elle ne portait pas un préjudice grave à nos intérêts ; elle prouvait pourtant qu’avec de la ténacité l’ennemi pouvait tenir en échec la politique de Dupleix. Sans doute l’indiscipline et la lâcheté de nos cipayes avaient tout fait échouer et le départ in extremis des troupes de Vellore avait encore accru nos difficultés, mais Dupleix n’avait-il pas aussi un peu sous-estimé la valeur de l’ennemi et ses moyens de défense ? Il s’imaginait qu’avec trois ou quatre bonnes attaques on viendrait aisément à bout de la place. Cet optimisme qu’on retrouve en la plupart de ses actes ne fut pas une des moindres causes de ses insuccès ; il lui masqua souvent les difficultés réelles des entreprises.

L’échec de Tirnamallé eut pour conséquence immédiate la retraite définitive de Mortiz Ali ; sans rompre avec Dupleix comme sans se lier avec les Anglais, il rentra sans éclat dans la neutralité et de son joli palais de Vellore entouré de toutes parts d’eaux profondes, il se borna à surveiller avec une sorte d’indifférence la marche des événements. Il fut assez sage pour ne pas poursuivre le titre dangereux de nabab d’Arcate et gagna en sécurité ce qu’il perdit en honneur et en vanité.

Si faible, si peu régulier qu’eut été le concours de ce prince, sa retraite n’en accroissait pas moins nos embarras, en attirant sur nous seuls et sur nos postes