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« Je ne puis rien vous dire sur les raisons qui empêchent notre armée de donner et ne comprends pas non plus ce que veut dire Morarao sur ce qu’il ne faut que deux heures pour détruire l’ennemi. S’il pense de même, pourquoi reculer et laisser à l’ennemi le temps de faire des réflexions ? » [1] « Il ne faut pas, écrivait-il trois jours plus tard, laisser sans mouvements une armée aussi considérable que la nôtre ».

Mais il était écrit que la fatalité s’attachait à notre armée. Brenier ne voulant plus accepter de commandement d’aucune sorte rentra à Pondichéry. Astruc, qui le remplaça, demanda également à revenir sous prétexte de maladie : on le lui refusa ; Maissin enfin tomba malade de la dysenterie et se retira à Sriringam laissant provisoirement à Astruc la direction des opérations. Se sentant mieux au bout de cinq à six jours, il reprit le commandement, mais pour l’abandonner de nouveau vers le 18 septembre. Tout concourait à jeter le désarroi dans l’esprit de nos troupes et à enlever à nos affaires l’unité et la continuité de vues dont elles avaient besoin.

On le vit bien à la nouvelle action qui s’engagea le 21 septembre. Astruc avait réoccupé le Roc d’Or que nous avions perdu le 9 août et y avait placé 100 européens, 600 cipayes et deux pièces de canon, avec des retranchements sur trois côtés. Dans la plaine évoluait la cava-

  1. Cette opinion de Morarao était-elle sincère ? Il est permis d’en douter et moins que jamais Dupleix avait confiance en lui : « Je ne sais que trop penser de la conduite de Morarao, écrivait-il à Maissin le 10 septembre ; cet homme ne répond point du tout à la confiance qu’on lui accorde. Je n’ignore point que, sous prétexte de vouloir accommoder le Tanjaour avec nous, il a demandé à ce prince 100.000 rs. qui lui ont été refusées. Ce refus pourra-t-il faire effet sur lui et ne sera-t-il jamais rassasié d’argent ? S’il n’a pas voulu passer le Coléron lorsqu’il le pouvait, c’est qu’il comptait par cette manœuvre que le raja de Tanjaour reconnaîtrait ce service. L’avidité de cet homme ne sert qu’à ruiner nos affaires. »