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nos forces qu’à les éprouver véritablement. Aussi, après quelques heures de combat, se décida-t-il à repasser la rivière de Gingy et nous pûmes nous attribuer les honneurs de la journée. Vu les faibles pertes éprouvées par l’ennemi, c’était surtout un succès moral que nous pouvions revendiquer. Dans la nuit, il tomba une forte pluie qui gêna singulièrement les mouvements de l’ennemi.

Kerjean abandonna à son tour la position qu’il avait si heureusement défendue. L’ennemi s’étant rapproché de la côte, comme s’il voulait s’abriter derrière le Chounambar[1], Kerjean s’en rapprocha également. Les Anglais en se retirant avaient tout incendié sur leur passage : Dupleix pria formellement Kerjean de ne pas imiter leur exemple : « le pauvre peuple, disait-il, ne doit pas être la victime de leur mauvaise humeur, qui est poussée à l’excès. »

Cependant Kerjean était fatigué d’exercer un commandement qu’il n’avait pas sollicité. Revenu du Décan avec l’idée de repasser en France par l’un des vaisseaux d’octobre ou de novembre et voyant ce délai approcher à grands pas, il n’avait accepté de se conformer au choix de son oncle que par l’impossibilité où celui-ci s’était alors trouvé de faire accepter le pouvoir à Brenier retenu dans Gingy par un siège que l’on prévoyait. Mais maintenant Gingy était dégagé de tous les côtés. Dupleix offrit à nouveau à Brenier de prendre la succession de Kerjean (4 septembre). Mais à peine lui avait-il fait cette proposition qu’un événement malheureux remit tout en question.

Lawrence ne s’était pas retiré au-delà du Chounambar

  1. En se rapprochant de la côte, à environ 6 kilomètres de la mer, la rivière de Gingy se divise en deux bras. Celui du nord s’appelle la rivière d’Ariancoupom et celui du sud, le plus important des deux, le Chounambar.