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d’hostilité et même de se retirer ici, si on le veut bien, laissant à Cheringam la grosse artillerie en dépôt jusqu’à la conclusion de la paix. Les intentions du nabab Salabet j. et les miennes sont d’arrêter l’effusion du sang qui ne dure que trop. Je suis persuadé que les alliés de Mahamet Ali se porteront également à rendre la tranquillité dans cette partie de l’Inde. »

Il n’est pas besoin de faire remarquer avec quel calme apparent Dupleix sut voiler dans cette lettre les inquiétudes de son âme et dissimuler la gravité de la situation ; à la lire, on pourrait croire que c’est lui qui octroie la paix comme un acte de pure générosité. La réalité était, hélas ! toute différente : lorsque la lettre arriva à d’Auteuil, le dernier sacrifice était accompli : Law venait de capituler.

Lawrence nous dit dans ses mémoires que, réduite à la dernière extrémité par le défaut de vivres plutôt que par le manque d’hommes, une partie de notre armée indienne commença à déserter, sous l’espoir du pardon et de la protection que lui promit Mahamet Ali. Un de nos principaux chefs, dont il ne donne pas le nom, suivit cet exemple et vint trouver les Anglais avec 1.000 chevaux, un gros corps de cipayes et 14 éléphants. Que pouvait faire Law en présence d’une telle démoralisation ? Comprenant que l’heure fatale était venue, il voulut du moins sauver Chanda S., qui, s’il tombait aux mains de son rival, courait grand risque de perdre la vie. Il songea un instant à le faire sauver par le fleuve, mais les eaux du Coléron étaient trop basses pour permettre une fuite rapide jusqu’à la côte. Il s’en rapporta alors à la loyauté de Manogy et lui offrit une somme d’argent s’il voulait recevoir Chanda S., comme hôte plutôt que comme prisonnier, et le faire conduire à Karikal. Le général de Tanjore fit solennellement la promesse qu’on lui demandait mais ne