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rait à rien, si l’on ne s’adressait d’abord aux Anglais. « Ce ne sera jamais mon sentiment, écrivait Dupleix à d’Auteuil le 6 juin, et je crois que tout bon français doit penser de même. Mais il [Law] a l’esprit anglais ». Et dans une autre lettre du même jour, adressée à Law lui-même, il lui recommandait encore une fois, quoi qu’il arrivât, de ne pas s’adresser aux Anglais, nos véritables ennemis. Le premier article de la paix à faire, lui disait-il encore, était la cession de Trichinopoly à Mahamet Ali, le second, d’obtenir une retraite honorable avec canons, munitions, et bagages.

Mais était-il possible de s’entendre sur ces conditions avec Mahamet Ali, sans recourir aux Anglais qui le tenaient sous leur dépendance ? d’Auteuil reçut bien du nabab une invitation à venir conférer avec lui ; invitation illusoire, puisqu’il fallait un passeport de Lawrence. Or, disait Dupleix (lettre du 8 juin), « chacun vous dit de venir auprès de lui, mais cependant on ne vous envoie pas les passeports : c’est une gentillesse des Anglais qui voudraient que vous vous adressiez à eux, mais donnez-vous en bien garde. Cette nation et surtout Lawrence ne mérite de nous que notre indignation ».

« Les Anglais sont gens à se moquer du droit des gens. N’êtes-vous pas informé de tout ce que fait Lawrence ? Il n’y a rien de sacré pour lui » (Lettre du 3 juin).

Quant à Morarao, d’Auteuil lui avait transmis les propositions de Dupleix, avec toutes les séductions qu’elles comportaient. Il en fut pour sa peine ; le chef marate ne refusa pas absolument de causer avec nous ; mais, avec une certaine hauteur, il demanda que Dupleix lui envoyât un vaquil pour mieux être informé de nos intentions. Sans doute connaissait-il l’état précaire de notre armée et