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plaire tout préparé ; cette copie fut en effet envoyée à Londres et communiquée à la Compagnie anglaise.

Il fallait à Dupleix une singulière confiance en sa cause pour affronter une pareille épreuve et s’imaginer qu’il lui suffirait de présenter les événements de telle façon que, par un respect naturel de la justice, la Compagnie anglaise et le roi fussent amenés à donner tort à leurs propres compatriotes. Il n’est pas dans les habitudes des gouvernements de condamner leurs agents sur des rapports étrangers, surtout lorsqu’il y a dans ces rapports quelque âpreté et quelque amertume ; or la lettre de Dupleix se ressent de son caractère ; elle est peut-être juste dans ses principes, mais elle n’est ni souple ni habile. Dupleix négligeait trop volontiers l’art de se concilier les sympathies.

Pour gagner sa cause auprès de la Compagnie anglaise Dupleix n’avait qu’un moyen, si tant est qu’il fût efficace, c’était de représenter ses protégés comme les souverains légitimes du pays et leurs opposants comme des rebelles. Aussi sa lettre pose-t-elle cette donnée comme un dogme intangible et sacré. Le principe de légitimité domine toute la discussion comme il inspira en fait toute la politique de Dupleix. Celui-ci ne suppose pas un instant que sa thèse puisse être contestée ; il l’affirme, il la proclame et, après l’avoir établie, il en tire les conséquences. Et ces conséquences sont que les Anglais violent à chaque instant les règles du Droit et de la Justice en soutenant contre nous des princes qui n’ont pour revendiquer le pouvoir que des titres sans valeur, fictifs, faux ou fabriqués. Chacun des articles qu’il développe n’a pour but que de faire ressortir leurs infractions soit à la morale politique soit à la morale naturelle. Ce sont des procédés indignes d’une nation civilisée et Dupleix ne doute pas