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blocus ne fut guère plus effectif ; il y avait encore trop de jours entre nos divers détachements et les approvisionnements de la place passaient au travers comme si elle eut été ouverte au commerce. Les Anglais suffisamment nourris ne redoutaient rien derrière leurs murailles.

Le siège n’avançait donc pas. Dupleix n’en continuait pas moins d’avoir confiance en Law ; du moins il l’écrivait ; mais il en avait beaucoup moins en Chanda S. Depuis le commencement des hostilités, il l’accusait de passer son temps à former les projets les plus divers et les plus chimériques, sans en exécuter aucun, s’aliénant l’esprit de ses sujets, inquiétant sans profit ses voisins, notamment le roi de Tanjore, et perdant les uns après les autres les concours les plus utiles[1]. Comme nous n’étions que ses auxiliaires et que théoriquement nous devions conformer nos manœuvres aux siennes, c’était sur lui que Dupleix faisait retomber de préférence la responsabilité de la lenteur des opérations. Aussi, en ses jours de mauvaise humeur, parlait-il de l’abandonner à sa destinée, dût Trichinopoly être perdu du même coup.

Or, il y songeait moins que jamais. Au début de janvier 1750, il avait obtenu de Muzaffer j. la nababie d’Arcate et s’en était aussitôt dessaisi au profit de Chanda S. Les fautes ou les défauts de ce prince, exagérés peut-être avec complaisance, lui furent un heureux prétexte pour revenir sur le passé. Pourquoi n’exercerait-il pas lui-même le pouvoir qu’il avait délégué ? Il aurait plus

  1. « Chanda Sahib prend toujours le faux et jamais le vrai ; aussi toutes les affaires vont de travers. Cet homme fera tant à la fin que je me dégoûterai. Sa conduite avec Tauréour est indigne ; aussi perd-il la confiance de tout le monde et c’est une des raisons pourquoi les paliagars ne viennent pas le joindre. » — Dupleix à Law, 6 décembre 1749.