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déclarer d’une façon plus nette, il écrivit enfin à d’Auteuil :

« J’ai reçu la lettre que vous m’avez écrite. Abdoul Kader est arrivé ici, il m’a informé de toutes choses. Tout ce que vous me faites dire par lui est très poli. Cependant vous m’écrivez dans des termes extrêmement forts, ce qui me surprend et fait naître des doutes. Les grandes affaires ne se terminent pas si aisément : lorsqu’on presse de finir, elles vont toujours mal. Vous avez de l’esprit et de la capacité ; c’est pourquoi je ne crois pas devoir vous en dire davantage. Il faut que je cherche quelques prétextes pour renvoyer ceux qui sont ici [les Anglais]. Je vous chéris sincèrement et je n’ai pas deux façons de penser à votre égard. Je vous prie de n’être pas indisposé contre moi… Supposez que vos adversaires, ceux qui sont à mon service, m’arrêtent sous prétexte que je leur dois leur paye, il faut me prendre alors sous votre protection. Je vous prie de me faire cette promesse par écrit. Celui qui ne redoute pas la mort ne craint rien. Tout ce que vous m’avez fait dire par Abdoul Kader me console et me tranquillise. »

La négociation avec Mahamet Ali en resta là. Il est peu vraisemblable que ce soit la crainte des Anglais qui l’ait fait échouer. Tout porte à croire que l’affaire fut engagée avec leur assentiment, dans l’intention de pénétrer nos secrets ou de surprendre nos desseins. Abd oul Kader n’était qu’un espion. En tout cas, les sentiments des Anglais n’étaient pas douteux : ils étaient loin de songer à la paix, et Dupleix dut être singulièrement désenchanté, lorsque, le gros de nos forces se rapprochant chaque jour de Trichinopoly, le Conseil de Goudelour éleva tout d’un coup une invraisemblable prétention. Il déclara, sans fournir d’ailleurs la moindre preuve, que tout ce pays lui avait été donné en gage par Mahamet Ali et que nous n’avions aucun droit d’y pénétrer. Il adressa en