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cette dernière entreprise. Je ne me décourage pas facilement ; c’est à ma persévérance qu’est due toute la fortune de Pondichéry et malgré les traces d’ingratitude que je trouve de temps en temps également chez les miens comme chez les autres, je ne jette pas le manche après la cognée… Ah, mon cher frère, pourquoi vous trouvez-vous à la tête de ce corps ? Si c’était tout autre que vous, je m’en consolerais plus facilement, au lieu que j’en suis au désespoir, par la seule raison que vous y êtes… Qu’eussiez-vous donc fait si vous aviez été battu ? »

Ce même jour, Dupleix reçut le divan de Chanda S. ; il traita son maître de lâche et de poltron et menaça de l’abandonner : menace d’ailleurs de pure forme.

Les deux mois et demi qui suivirent l’affaire de Valconde n’amenèrent aucun changement notable dans la situation. Après leur défaite, les Anglais, mollement poursuivis, se retirèrent à Outatour qui n’est plus qu’à 20 milles au nord du Coléron, puis, leurs forces étant très réduites, ils estimèrent qu’ils ne seraient en sûreté que sous les murs de Trichinopoly et ils passèrent le fleuve le 28 juillet. Les eaux sont toujours très hautes à ce moment de l’année ; deux des bateaux qui portaient les troupes coulèrent et, d’après une lettre de Madras, il y aurait eu 115 blancs et plus de 300 hommes noyés, sans compter la perte d’une grande quantité de munitions. C’est en vain que Dupleix avait ordonné à d’Auteuil de poursuivre les fuyards ; avec la supériorité numérique que nous possédions, on pouvait tous les précipiter dans le fleuve. D’Auteuil joignait à une paresse d’esprit naturelle une confiance exagérée dans les donneurs de conseils et ses officiers, dont aucun n’avait de grandes qualités, ne l’encourageaient pas à marcher de l’avant. Sous leur action déprimante, il écrivait à Dupleix des lettres pleines de mauvaise humeur et parlait cons-