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se rendre compte de l’importance réelle de cette place et prendre, de ce point d’observation, les mesures les plus convenables pour une expédition militaire, soit du côté du nord soit du côté du sud ; or son intention, comme on va le voir, n’était pas d’attaquer Trichinopoly, mais d’aller d’abord inquiéter les Anglais du côté de Madras.

Mahamet Ali reçut avec surprise les propositions de Salabet j. ; il avait espéré moins de complaisance. Pris à son propre piège, il lui était difficile de ne point se conformer au désir qu’il avait lui-même exprimé de conclure la paix, mais que n’inventa-t-il pas pour dissimuler ses véritables intentions ? Tantôt il disait avoir reçu un firman du Grand Mogol l’investissant directement de Trichinopoly et tantôt il invoquait un ordre de Salabet j., l’invitant à payer le chotaye aux Marates. Dupleix ne se gêna pas pour lui répondre en deux lettres assez dures que toutes ces pièces étaient de son invention et qu’il les avait lui-même fabriquées (B. N. 9159, p. 333 et 340-341). Ces supercheries passant en Orient pour une preuve d’habileté, Mahamet Ali dut plutôt être flatté du reproche, mais il lui était impossible de pousser plus loin la dissimulation : à la fin, il lui fallut avouer que, quel que fut son désir de s’entendre avec Dupleix, il ne le pouvait pas ; il n’était plus le maître de ses actions. Un envoyé spécial, nommé Naras pendet, vint peu de jours après confirmer à Dupleix lui-même cette étrange mais utile déclaration.

C’est alors que se posa nettement devant le gouverneur de Pondichéry la question de savoir comment il engagerait le mieux les hostilités. Prévoyant qu’il ne resterait pas inactif, les Anglais pensèrent que, suivant le précédent de 1736, les Français voudraient d’abord s’emparer de Trichinopoly et, pour parer à la chute de cette place,