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bouche ou sous la plume de Dupleix, dont l’œuvre fut toute d’action et non pas de théorie. Non pas que ces appréciations émises au cours d’une lutte passionnée se recommandent toutes par une impartialité impossible ; mais telles quelles, on doit bien reconnaître que, pour avoir été formulées il y a près de deux siècles, on les dirait pour la plupart écrites d’hier et d’aujourd’hui.

Ce ne sera pas notre faute si les jugements de Dupleix sont parfois en opposition avec les sentiments de notre époque où l’idéologie est maîtresse : Dupleix a fort justement décrit en plusieurs de ses lettres l’état d’esprit des gens qui sont disposés à tout abandonner plutôt que de résister à des amabilités douteuses et il en donne les motifs. Désireux toutefois de ne pas introduire dans une œuvre purement historique des remarques qui pourraient confiner à la polémique, nous laisserons presque toujours la parole à Dupleix, soit que nous analysions ses lettres ou ses rapports, soit — comme il arrivera le plus souvent — que nous citions les termes textuels de sa correspondance.

On ne sait pas si Dupleix avait été élevé dans la haine des Anglais, mais c’est probable ; il n’avait pas dix-sept ans lorsque fut signé le traité d’Utrecht, et ses premières années furent remplies par le récit des événements de la Guerre de la Succession d’Espagne, où Guillaume III, puis la reine Anne furent l’âme de la coalition contre Louis XIV. Quoi qu’il en soit, dans les premières années de son séjour à Pondichéry, où il occupait un poste secondaire, il n’eut avec nos voisins que des rapports sans importance. Nommé directeur au Bengale en 1731, il entretint de bonnes relations avec les trois gouverneurs de Calcutta qu’il connut : Alexandre Hume, Stackhouse et Braddyl, soit qu’il allât les voir, soit qu’il les reçût lui-même