Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 3.djvu/161

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


§ 5. — Opinion de Dupleix sur les Anglais. — Comment ceux-ci furent amenés à combattre ses projets.

Ce prince ne se maintenait que par l’appui que lui prêtaient les Anglais. Comme cet appui ne cessa de se manifester jusqu’à leur triomphe commun, il n’est peut-être pas inutile et, en tout cas, il est intéressant d’esquisser d’après la correspondance même de Dupleix, ce que celui-ci fut amené par les circonstances à penser de ses rivaux, devenus bientôt ses ennemis, et dans quel esprit il engagea avec eux la partie pour la suprématie du Carnatic.

Lorsqu’on prononce le nom de Dupleix, le plus ignorant des Français reconnait d’abord en lui un ennemi de l’Angleterre et c’est pourquoi son souvenir est resté si vivace et si populaire en notre pays ; il nous rappelle beaucoup moins un empire perdu qu’il ne symbolise l’esprit de résistance à une nation qui, tout en participant à des coalitions paraissant avoir pour but un certain équilibre entre les peuples, n’a jamais eu d’autre désir que d’empêcher entre eux une réconciliation équitable, afin de mieux asseoir sa suprématie financière et économique. Mais combien, parmi ceux qui exaltent l’âme et la mémoire de Dupleix, savent ce qu’il pensait de nos rivaux, comment il appréciait leur caractère et leur politique et quels moyens lui paraissaient les meilleurs pour leur résister ? Oiseuses ou tout à fait indifférentes si elles étaient exprimées par un homme même instruit mais n’ayant jamais participé aux affaires publiques, ces opinions acquièrent une valeur particulière dans la