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heur, il dit à Ananda : « J’ai emprunté de grosses sommes d’argent et j’ai cédé à la Compagnie les jaguirs qu’on m’avait donnés. Ainsi mon argent s’en est allé. Vous savez ce que c’est que de travailler avec la Compagnie. Elle m’appréciera et elle sera satisfaite aussi longtemps que les affaires iront bien et qu’elle fera des profits, mais si quelque chose va mal, elle me blâmera pour m’être fait sans ses ordres des ennemis des puissances du pays. Vous savez que tout cet argent est le mien : ainsi je serai tout à la fois blâmé et je le perdrai. » (Ananda, t. 7, p. 6). D’Auteuil signalait en même temps que Muzaffer j. négociait avec son oncle d’inquiétante façon. Où pouvaient conduire ces négociations, si peu secrètes qu’elles fussent, sinon à jeter le doute dans l’esprit des soldats sur la solidité des alliances et finalement à démoraliser l’armée ? Le malaise que chacun éprouvait ne dura pas longtemps. Sur la nouvelle que Lawrence venait de joindre Nazer j., 13 de nos officiers vinrent déclarer par écrit (2 avril) à d’Auteuil qu’ils refusaient de combattre, parce que notre armée était trop faible pour attaquer les 50.000 cavaliers de l’ennemi, sans compter les cipayes et toute l’artillerie anglaise. On ne pouvait, disaient-ils, compter sur la bravoure et la vigilance des soldats de Chanda S. et de Muzaffer j. ; tout l’effort de la bataille retomberait sur les nôtres, sur nos cipayes et sur les Cafres ; comment voulait-on qu’ils pussent lutter contre un ennemi si supérieur en nombre ? Tous périraient. Sans leur donner tout à fait tort, d’Auteuil transmit leurs observations à Pondichéry. Dupleix envoya aussitôt le vieux major Bury pour rappeler les officiers à leur devoir (3 avril). Mission inutile ; Bury, qui depuis longtemps n’avait plus aucune vigueur d’esprit, partagea leurs sentiments plutôt qu’il ne les désapprouva, et revint